QualiAgro, des composts urbains au service d’une agriculture durable

Producteur de plus d’1 million de tonnes de compost par an, Veolia s’implique depuis vingt ans dans un projet de recherche expérimentale baptisé QualiAgro. Sa finalité : évaluer la qualité agronomique, sanitaire et environnementale de différents types de composts urbains et leur capacité à valoriser les sols pour qu’ils redeviennent plus fertiles et durables.
Published in the dossier of avril 2018
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Nourrir la planète sans dégrader la qualité des sols et des cultures reste un défi majeur de l’humanité. Parmi les pistes prometteuses pour garantir la sécurité alimentaire tout en préservant les ressources naturelles, celle d’un recours aux déchets urbains organiques*, pour fertiliser et amender les sols, notamment ceux abîmés par les activités humaines et les pratiques agricoles intensives. Le pouvoir fertilisant et amendant** des Produits Résiduaires Organiques (PRO)*** varie selon leur provenance : boues d’épuration, biodéchets, ordures ménagères résiduelles ou fumier d’origine animale. Veolia et son partenaire, l’Institut national de recherche agronomique (Inra), en mesurent les effets sur les sols depuis 1998.

QualiAgro, projet au long cours

A une trentaine de kilomètres à l’ouest de Paris, les 40 parcelles expérimentales du projet QualiAgro se répartissent sur 6,5 hectares de sol agricole limoneux. Objectifs : évaluer l’efficacité agronomique des composts urbains, contrôler leur qualité sanitaire et environnementale et enfin suivre l’évolution des sols, des cultures et des eaux. Le dispositif est déployé selon une rotation des cultures de blé et de maïs, deux céréales alimentaires représentatives des grandes cultures ancestrales en France. Le travail est protocolaire. Tout est mesuré scrupuleusement et comparé selon l’origine du compost testé : les caractéristiques des PRO, ainsi que leurs effets sur les sols, les plantes, l’eau du sol et la qualité de l’air au-dessus des parcelles. De nombreuses méthodes de mesure ont été mises en œuvre pour contrôler l’ensemble de ces effets et certaines sont installées de manière permanente au niveau des parcelles (tels que des lysimètres**** ou des enceintes pour mesurer des gaz).

Premier bilan : boues et biodéchets plus efficaces

Après 15 ans d’essais au champ, la première phase du projet pilote (1998-2013) a livré son bilan en 2015. L’Inra constate ainsi que « les composts de biodéchets et de boues, du point de vue agronomique, se révèlent les plus efficaces en raison de leur plus grande stabilité. […] Les rendements des cultures de printemps implantées immédiatement après apport sont similaires à ceux obtenus avec une fertilisation minérale seule. Cependant, nuance l’Institut, ces composts urbains entraînent des concentrations en métaux (cuivre et zinc essentiellement) dans la couche superficielle du sol dans laquelle ils sont incorporés ». Cet apport ne modifie pas notablement la qualité des sols car, comme l’indique l’Inra, « les relevés des concentrations sont similaires à ceux mesurés dans les sols similaires de la région ».

Une deuxième phase portée par le bio

« En 2014, une seconde phase d’essais au champ a démarré, qui aligne le dispositif expérimental sur les critères de l’agriculture biologique, complète Maria Albuquerque (Lire son interview), responsable de ce projet chez Veolia, afin d’étudier le comportement de nos composts dans ce nouvel itinéraire technique. Plus précisément, comment comparer une fertilisation organique par apport de compost à l’effet d’une culture intermédiaire comme la luzerne ? »

Ces nouveaux essais au champ renvoient de fait à l’évolution actuelle des pratiques culturales, qui ont pour objectif l’abandon à plus ou moins brève échéance de l’usage de fertilisants minéraux et de pesticides. L’adoption d’une diversification des cultures va de pair avec cet objectif : une légumineuse – la luzerne – capable de retenir l’azote dans le sol est intercalée dans la rotation maïs-blé mise au point dans le dispositif précédent.

Le site QualiAgro s’insère dans un vaste réseau national et européen d’observation sur le retour au sol des PRO – SOERE PRO (Système d’Observations et d’Expérimentations pour la Recherche en Environnement sur les PRO). Sa mission est d’évaluer sur le long terme les effets de ce type d’épandages sur la qualité des sols.

Les données extraites de ces essais en plein champ sont utilisées par de nombreux programmes pluridisciplinaires associés (voir les chiffres ci-dessous), à l’image du partenaire européen de QualiAgro de 2011 à 2014, ECOSOM. Ce dernier a développé de nouveaux indicateurs capables d’évaluer les effets de ces composts sur les écosystèmes des sols (Lire l’article : Les composts, bons pour les sols). Ces programmes scientifiques favorisent les échanges entre chercheurs, représentants de la profession agricole, collectivités locales et Veolia. Un travail au long cours pour répondre aux enjeux de demain et trouver l’équilibre entre croissance des besoins alimentaires et préservation des ressources et de la biodiversité de notre planète.

Quelques chiffres

34 programmes de recherche nationaux ou internationaux rattachés à l’essai QualiAgro (dont 5 en cours) depuis 1998
17 thèses sur le dispositif QualiAgro depuis 1998
58 articles dans 26 revues différentes depuis 2007
124 présentations orales dans 70 congrès depuis 2004

 

*les déchets urbains organiques sont classés en trois catégories : les déchets organiques triés à la source, ; ceux provenant des ordures ménagères résiduelles (OMR, déchets non triés à la source) et les boues d’épuration.
** Le pouvoir fertilisant : capacité à rendre disponibles et durables des éléments nutritifs pour les plantes ; le pouvoir amendant améliore les propriétés du sol et sa structure physique avec un impact sur la résistance à l’érosion, la réduction de la battance, etc.
*** Les produits résiduaires organiques (PRO) comprennent les déchets d’origine non agricole (boues de station d’épuration de collectivités ou industrielles, les biodéchets et les déchets organiques d’ordures ménagères) et les effluents d’élevage (fumier). Ils sont valorisés en composts.
**** Dispositif qui permet d’étudier quantitativement l’évolution de l’eau dans un profil de sol.

> Brochure ECOSOM